Quand on mangera les mouettes

Publié le par arachnimodo

Une fois de plus ses résolutions s'évanouïrent, la fatigue le submergeait, la vie instinctive reprenait ses droits.

Gilar la blonde, son nez si mince, demeurait imprégnée sur sa rétine. Les chacoyans hurlaient au loin. Colère ou détresse infinie.

Qui dira la solitude des monstres ?

Dans le ciel dansait une bulle de savon qui pétrifiait les lumières de la ville. L'odeur de la chair faisandée descendait des arbres où l'on avait pendu le gigondelles. L'une d'elles s'écrasa au sol avec un bruit mou. Naret rampa jusqu'au pied du samicage et commença à la limocer goulûment. Le jus friboussait de sa mancrotte et il poussa un râle de plaisir.

Un viradou s'approcha. Il portait un sapolon jaune et ondulait des hanches. Comment l'éloigner ? La menace était précise et pointait vers lui. Naret se saisit de la flipette et la brandit en feulant d'une manière narquoise. La jaquette se débanda et disparut au coeur des chorènes.

Une onde de chaleur coulait à quinze pas. Naret aurait voulu s'y prélasser, mais l'arnosermicité &tait encore trop forte.

Il cueillit un pamprignon et le croqua prestement, la sève fit couler un filet glacé sur son désir.

La buche hulotte chuintait face à la bulle blafarde.

La pluie jaillit soudain du sol et elle sonnait là-haut sur la calotte avant de redescendre sur les côtés.

La vacuité ambiante le tourmentait. Il tira de sa gibasse unrecueil de parfums et se mit à le dénifler avec passion.

Comme tous les sensuels, il se livrait à ce plaisir avec la délectation de celui qui sait appartenir à une gluste supéririeure.

Le serpent-réveil se mit soudain à cracher. Naret se glissa précautionneusement dans son cocon. Ses ailes se froissèrent avec un crissement de sois. La tiédeur l'envahit. Le vent se levait. La terre était agitée. L'enfance revenait au galop. Les premiers effluves dans sa trompelle, les puissantes vibrations de ses antelles.

Il se souvint du bagne, sa vie de chenillard. Ces repas de salade, monotones, interminables. Du vert, rien que du vert, tout cela pour atteindre un jour le bleu et les parfums, à plusieurs kilotranches, l'odeur de la femouche... Gilar, ta peau diaprée, tes senteurs, tes frébissements...

L'engourdissement le saisit, des étoiles de glace s'étaient levées et des météorites tissaient leurs toiles d'or éphémères.

Gilar se dorait au soleil. Sa peau e lézard luisait. La blonde chevelure crépitait comme un bain de friture. Son sang froid bouillonnait. La mer léchait la plage avec un raclement de bafreur de soupe. Son bleu argenté métallisait au loin. Les barquasses dormaient dans la vase. Les champs d'herbes marines brunoyaient dans les criques. Un voile de voiles glissait à l'horizon. Splendeur matinale. Fraîcheur du silence. Une vouche, l'épée fourchue visque brusquement. L'insecte frétilla et cracha piteusement son lait sucré teinté de rouge mortel.

Un troupeau d'hermaphrodites paissait pacifiquement dans les foins fous. Herbes folles, folle avoine, coquelicuches, paviches et marguerotes aux coeurs violets.

Leurs gringotements fusaient au loin, affolant les sacretelles aux cannes fuselées. Un quatuor de frillons frappaient frénétiquement leurs thorax sonores, tandis que les deux cigouches faisaient sécher leurs robes frêles dans un bain d'ultraviolets.

Une ivresse flotta. L'éclair zigzaga de Naret à Gilar et leurs cerveaux entrèrent en ébullition. Une espèce d'odeur de cuisine. Des oignons en train de roussir dans l'huile. Gilar avait faim. Rlle se leva et s'humecta la cibouche en frémissant des naroches. Sa peau d'acier luisait d'un éclat bleuté et ses prunelles étincelaient. Elle croqua un chardon et mâcha longuement la tige.

Le ciel floculait en orange. Le sol trémolait avec ferveur. Le désir de Naret ondulait à travers la prairie. Un épi d'or de ficha dans la rétine de gilar qui frémit de tendresse.

Mars jetait sa clarté rougeâtre sur le paysage. Elle se courba élastiquement au franchissement d'une voûte, puis bondit souplement par-dessus un fossé soupirant. Une cascade verte luminescente la caressa au passage. Naret n'était plus loin.

 

La chasse commençit. Une inqiètude tremblait dans la lumièrejaunâtre. Un parfum aigu lui vrilla les seins. Son épiderme visquait abondamment. Un hurlement d'insecte la fit vaciller, quelque mahdubithérion affolé sans doute.

La cascouasine guettait sa proie, tapie dans les buissons et le mantifi sifflait virtuellement dans les chambrelles. Un nénuphar anthracite clignotait par intervalles.

Gilar aperçut soudain le hamac vibrant, dans les branchages. Elle s'aplatit au sol et se mit à bavouser frénétiquement.

Naret se balançait sauvagement. Le cocon éclata.

Minute folle... Les mondes basculaient. Les étoiles filaient sur le sol, l'herbe pendait au firmament. Des flaques vertes dansaient dans les yeux de Gilar. Naret contemplait des champs de jacinthes. L'onde ventrale les faisait hurler et gémir. L'infernal manège s'accélérait, déchirant le temps, du big-bang du passé à celui de l'avenir, d'un pôle à l'autre de la sphère universelle. Les comètes rugissaient, les orbites tournoyaient, les soleils explosaient à l'infini. Un parfum de mort, fade et persistant avait envahi leurs papilles et le sang coulait en abondance.

Deux énormes phagouciaux se contentaient de grucher leurs tétules.

Repos, léthargie. Baillements. Satisfaction. Ennui. Le désir est mort. Naret et Gilar vivent encore. Le nirnana est en fuite, loin derrière eux. Tous les maux, toutes les douleurs, toutes les misères, toutes le sensations, les impressions, les images, les parfums, la banalité, reviennent en masse.

Gilar happe un frelon et sa morsure dérisoire la console de la fadeur ambiante. Naret envie la douceur du cocon, sa tiédeur, son obscurité. Balancement doux de la mémoire enfantine. bercement, flottement. Berceau, rameau. Sommeil, mort, corps, battement, pulsation.

Silence.

Le lait sucré de la gigantesque fleur d'agave. Son envoûtement. Le poison qui vous évade, qui vous convie, qui vous convoie au-delà de la vie. Tranches de cactus, régal exquis des soirées embrumées.

Naret bouffait à s'en faire péter les ouïes. Gilar pleurait. Impossible de revoir un jour un tel orgasme. Sa sensibilité avait été tuée par la violence de celui-ci. Jamais. Le bonheur était derrière. Elle se sentit vieille.

Publié dans Fiction

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